La seule direction pour nous est de marcher dans les pas de Dieu en suivant ce que nous recevons. Dieu nous préparera, sans que nous sachions comment il l’accomplit. C’est à nous de l’accomplir, en suivant Dieu qui nous précède. (Bapak, Coombe Springs 13 aout 1959).

Ils vinrent d’Europe, et des autres continents. Ils vinrent d’Allemagne, d’Angleterre, d’Angola, d’Argentine, d’Australie, d’Autriche, de Belgique, du Canada, du Chili, de Colombie, de Croatie, du Danemark, du Congo, de l’Équateur, des États-Unis, d’Espagne, de France, de Grèce, de Hollande, de Hongrie, d’Inde, d’Indonésie, d’Irlande, d’Israël, d’Italie, du Liban, de Lituanie, de Moldavie, de Norvège, du Pérou, de Pologne, du Portugal, de Russie, de Suisse, de Turquie, d’Ukraine, de Zambie. Ils vinrent en avion, en train, en bus, en voiture. Ils voyagèrent de jour, de nuit, suivant différents parcours et correspondances. Ils étaient près de 400, et se retrouvèrent à Assise, en Ombrie, fin octobre de l’an 2022.
Il est minuit passé. Les phares du bus éclairent une portion de route qui émerge de la nuit noire. Le conducteur concentre son attention sur cet espace fugace, que rythme le défilement des balises latérales. Au loin quelques lumières indiquent la présence d’une agglomération, esquisse la silhouette d’un édifice. Parfois l’une d’elle grandit, se rapproche rapidement. C’est une voiture qui roule sur la voie opposée. Les passagers se sont assoupis pour la plupart. Les heures passent, puis au loin apparait une myriade de points brillants. Le conducteur sort du silence, et annonce que nous sommes arrivés à destination. La haut, l’étoilement émane de l’ancienne ville et de la basilique, où repose Saint François.
Ils revirent des visages connus, amis, et aimés. Ils se saluèrent, s’embrassèrent, s’étreignirent. Ils donnèrent et prirent des nouvelles. Ils firent la connaissance d’autres, qui inconnus leurs semblaient néanmoins familiers et proches.

Une conférence de Bapak est projetée. La voix le pénètre, et comme souvent, une phrase résonne avec son état intérieur et l’éclaire soudain. Bapak est présent et continu de lui indiquer le chemin.
ils adorèrent Dieu, et pratiquèrent le latihan de Subud, le matin, le soir, et parfois dans la journée. Ensemble, Les yeux clos, se soumettant au pouvoir de Dieu, attentifs à la vibration née au profond d’eux, ils se déplacèrent, chantèrent, dansèrent, tournoyèrent, rirent, levèrent les bras, se prosternèrent, chacun selon sa manière et sa mesure. Leurs mouvements s’entrecroisaient sans qu’ils ne se gênent, leurs voix se mêlaient en un chœur fluctuant.
Debout, ils forment un cercle. L’un d’eux demande à recevoir ce qu’est l’amour de Dieu pour chacun, puis ce qu’est pour chacun son amour pour Dieu, et enfin, ce qui manque afin que leur amour pour Dieu soit complet. Ils le reçoivent. Le ressenti prend l’entièreté de son etre, et se déploie encore longtemps après. D’autres demandes sont énoncés, d’autres réponses surviennent.
Lors des repas, des réunions, des rencontres organisées ou impromptues, des ateliers, des spectacles, des pauses, des promenades, ils discutèrent, échangèrent, écoutèrent, participèrent, travaillèrent, regardèrent, partagèrent, et eurent le sentiment de former ensemble une fraternité, que rendait possible Celui qui les guidaient chacun intérieurement.
Un soir, il la croise sur l’allée qui le mène à l’hôtel. Elle s’y rend aussi, et âgée, se déplace avec lenteur. Elle lui demande de l’accompagner, car sa présence la rassurerai. Il accorde ses pas aux siens. Elle se souvient des mots de cette langue apprise autrefois, et ainsi, ils conversent au gré de leur marche. Arrivés, ils se séparent, comblés par ce moment partagé.
Ils se rendirent dans les villes historiques d’Assise, de Péruge, de Spello, de Spoletto, édifiées sur les collines, qui dominent la plaine et le paysage environnant. Parmi les groupes de touristes, de pèlerins, ils déambulèrent dans les rues, les ruelles, les passages, Ils s’assirent aux terrasses, traversèrent des places, des jardins, entrèrent dans des basiliques, des églises, des chapelles, et virent d’innombrables et splendides peintures, fresques, mosaïques.
Au tournant d’une rue étroite, tout à coup, ils se trouvent face à la cathédrale en contrebas. Le clocher se dresse vers le ciel bleu. La façade de pierre blanche, ajourée de rosaces, et ornée d’un tympan doré, resplendit au soleil. Un emmarchement, puis un grand parvis en brique, les entrainent jusqu’au portique d’entrée. Ils le franchissent et pénètrent dans la nef, vers d’autres découvertes.

Les journées furent ensoleillées et douces, les nuits fraiches. Les jours furent intenses, les nuits courtes.
Pendant un atelier, il modèle la terre les yeux fermés. Ses mains se familiarisent peu à peu avec l’argile humide et collante. Puis il reprend l’exercice les yeux ouverts, mais désormais ses mains se sont libérées de l’emprise du regard et s’expriment d’elles même par le toucher qui entreprend la matière. Ses yeux assistent au travail des mains, d’où émerge une forme qu’il ne connait pas encore.

Le huitième jour, ils se saluèrent et se séparèrent. Ils remercièrent pour tout ce qui leur avait été donné. Ils reprirent bus, voiture, train, avion, et s’en retournèrent chez eux, dans leurs contrées et villes respectives. Ce qu’ils avaient vécu chacun, et partagé ensemble, portait la promesse de se déployer vers d’autres.
Irfan (texte et photos)